PETITE MUSIQUE DU SOIR
— Tiens, qui voilà !
Lili et Lucas en personne.
— On avait envie de le découvrir, ce fameux bistrot, explique Lili. Tu nous en as tellement parlé.
— Mme Irène, je vous présente mes meilleurs amis, déclare Rose, tout sourire. Elle, c'est l'institutrice de Grégoire…
— Et bientôt d'Olivier, coupe Lili, en avisant ce dernier, pendu aux basques de Béchir. Coucou, p'tit bonhomme !
Olivier tangue vers elle, les bras tendus :
— I-iii !
— Et lui, poursuit Rose en désignant Lucas, c'est un clown fabuleux.
— Enchantée, sourit Mme Irène. Que prenez-vous ? C'est ma tournée.
La conversation se poursuit devant un verre.
—
Au fait, je n'ai aucune nouvelle d'Amir, dit Lucas à Rose. Il a avancé,
sur la musique du film ? Le tournage se prépare, et j'aurais aimé
montrer quelque chose au réalisateur.
— Comment ? bondit Rose. Il ne t'a pas averti ?
— Averti de quoi ?
— Ben… il veut laisser tomber.
L'irruption de Wadiah et Fathia coupe court à la conversation.
— Reste avec tes amis, dit Mme Irène en se levant. Trois thés à la menthe, comme d'habitude, mesdemoiselles ?
Ayant confirmé la commande, les fatmas se dirigent vers au fond de la salle avec des litanies de Salaam aleikoum*.
— Ce sont les copines de Béchir, souffle Rose.
— On avait compris, répond Lili sur le même ton.
— Mme Irène les surnomme "le harem"…
Elle se marre.
— Tu disais quoi, à propos d'Amir ? reprend Lucas, visiblement contrarié.
— Qu'il veut laisser tomber. Il est très mal, en ce moment… Je ne sais plus à quel saint me vouer.
— J'irai le voir, en sortant d'ici. Je suis sûr que s'il s'y remettait, il irait mieux.
— Encore faudrait-il obtenir qu'il s'y remette !
—
Je vais essayer de le convaincre tant qu'il en est encore temps. Parce
que s'il tarde trop, on va être obligés de prendre quelqu'un d'autre. Ce
serait dommage, non ?
Ce
soir-là, Rose rentre chez elle pleine d'espoir. Le clown a-t-il eu gain
de cause ? Va-t-elle trouver son homme penché sur sa guitare ? Elle
écoute, en retenant son souffle.
Quelques notes lui parviennent à travers la paroi. Une bouffée de joie au ventre, elle ouvre la porte.
La guitare est dans le salon. Amir dans la cuisine. Prostré, comme d'habitude.
La musique, elle, provient de la chambre des enfants.
— Lucas est passé, tout à l'heure, répond Amir à sa question muette. Il a apporté un xylophone à Grégoire.
Rose en chialerait de désappointement.
*Salaam aleikoum : salutation arabe
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