LA
VIEILLE DAME INDIGNE
Eh oui, aussi
dérangeant que cela puisse paraître, trois mois
seulement après le décès de Sylvain, cet aperçu de la vie à deux,
même tronquée de son aspect charnel, m’avait séduite. La complicité,
les éclats de rire, les escapades dans les bois, les
vidéos au coin du feu… Les morceaux de guitare ponctuant les
soirées-papotages (Castor pratiquait le ragtime à haute dose)… Bref,
tous ces petits riens qui font le charme de l’existence —
et dont j’avais oublié la saveur — me manquaient, tout à coup. De
sorte que, bien malgré moi, je me surprenais à re-croire au bonheur. A
mon âge ? Et après les épreuves que je venais de
traverser ? Les êtres humains sont, décidément, d’incorrigibles
rêveurs. J’avais beau me raisonner, me répéter : « Arrête ton char, ma
fille, les vieilles dames indignes, y
a rien de plus pathétique », ça me démangeait grave.
Skype — béni
soit-il — n’était pas étranger à cette
bienfaisante exaltation. Car nous avions repris nos petites soirées
communes. Soirées au terme desquelles je finissais souvent par
m’endormir, sur du Marcel Dadi joué rien que pour moi, à
six cents bornes de distance…
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