LE CRI (SUITE)
Une autre fois :
— Je voudrais en finir, dit Amir.
En dépit des efforts du médecin, son état empire de jour en jour.
— Tu voudrais QUOI ? s'étrangle Rose — qui a très bien compris.
— Je suis un poids mort pour toi. Une charge inutile. C'est ce qui pourrait t'arriver de mieux, que je disparaisse…
« Qu'est-ce que je fais ? se demande Rose. Je lui en retourne une ? »
La tentation est si forte qu'elle en a des fourmis dans les doigts.
— Et les mômes, tu y as pensé ? rugit-elle. T'as décidé de les démolir, c'est ça ? De bousiller leur avenir ?
Il se bouche les oreilles :
— Tu ne comprends rien à rien !
—
Je comprends surtout que tu es un monstre d'égoïsme. Tout ce qui compte
pour toi, c'est toi, toi, toi. Qu'on morfle, les enfants et moi, tu
n'en as rien à battre. Elle a bon dos, la dépression, tiens !
Il la regarde. Les yeux immenses, dans son visage amaigri. Démesurés. Des yeux de martyr. De fou.
— Oh, pardon ! souffle-t-elle, en se jetant dans ses bras.
Et lui :
— C'est moi qui te demande pardon, chérie. Je vais essayer de tenir le coup, je te le promets.
N'empêche
que, désormais, Rose vivra avec cette épée de Damoclès au-dessus de la
tête. Et chaque soir, en rentrant, elle ne pourra se défendre d'une
sourde appréhension…
Du coup, elle décide d'emmener Olivier au travail.
— Tu seras plus pénard, prétexte-t-elle. Et Béchir adore jouer les nounous.
— Il est hémiplégique.
«
Et alors ? a-t-elle envie de dire. C'est moins traumatisant, pour un
gosse de deux ans, qu'un papa suicidaire ! » Mais elle s'en garde bien.
— Je l'aurai à l'œil, ne t'inquiète pas, répond-elle, rassurante.
— Décidément… ce satané troquet me prendra tout, même mon fils, marmonne Amir entre ses dents.
Rose fait semblant de ne pas l'entendre.
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