FLASH BACK (SUITE)
— Dans un décor pareil, j’écrirai mes meilleurs romans, affirmait-elle.
(Leur nid d’aigle, une bastide médiévale perchée sur un à-pic rocheux de trois cents mètres, dominait, de toute part, des coteaux verdoyants.)
— J’ouvrirai une galerie, se réjouissait-il. On y trouvera des ouvrages rares, des objets insolites ; un cabinet des curiosités, pourquoi pas ? Et les œuvres des artistes locaux.
Bref, les projets ne manquaient pas.
Durant l’heureuse décennie qui avait suivi, certains d’entre eux
s’étaient concrétisés. Cette grange du XVIème siècle dont la
restauration avait, saison après saison, mobilisé toutes ses énergies à
lui, par exemple. Ou cette saga d’humour vaguement arthurienne dans
laquelle elle s’était lancée à corps perdu et qui remportait un gentil
succès.
Ça baignait, quoi.
Les villageois avaient, sans réticence, adopté ces hurluberlus à la
niake communicative, d’autant qu’au fil du temps, la fille de l’une et
le frère de l’autre s’étaient installés à proximité — or cette
famille-là débordait de joie de vivre…Qu’ajouter à l’idyllique tableau, sinon que rien, alors, ne semblait devoir l’altérer ?
Etrange sensation que celle d’une éternité lente, immuable, d’où toute
ombre semble exclue à jamais. Le bonheur confère à ses adeptes une
sorte d’invincibilité gouailleuse. Ils étaient — nous étions — dans cet état d’esprit quand la laide maladie s’attaqua à Sylvain.
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