mardi 1 novembre 2016

LE BEL ÉTÉ 20




















                                                           TOUT S’EXPLIQUE !

                  La journée du lendemain ne fut guère plus brillante. Combien de personnes se rendirent compte que je n’étais pas dans mon état normal ? Je l’ignore. Les écrivains sont de si curieuses bêtes, n’est-ce pas. On ne peut jamais prévoir leurs réactions…
                  Castor, en revanche, ne me lâchait plus d’une semelle. Quitte à sembler « collant », il avait pris le parti de me surprotéger, quoi qu’il advienne, et passait son temps à ramasser tout ce que je semais derrière moi— sac, écharpe, livres, documents précieux (mon billet de retour, entre autres). Si bien que, vers dix-sept heures, quand la navette pour l’aéroport vint chercher les auteurs :
                  — Et si je te ramenais ?  proposa-t-il. Je n’aime pas te voir partir en avion. Tu es si fatiguée…
                   Je protestai avec énergie (bien que sa compagnie m’agréât nettement plus que celle de mes collègues) :
                  — Ne t’en fais pas : pendant le trajet, je serai avec les autres, et mon fils Olivier vient me chercher à Toulouse. Ce serait stupide de t’imposer une corvée pareille alors que tout est déjà programmé, non ?
         A contrecœur, il s’inclina, mais prit Rachel à part pour lui recommander de veiller sur moi. Elle promit, perplexe, et une fois dans l’avion, s’enquit :
                  — Qu’est-ce que t’as, Gudule ?  Je te trouve bizarre.
                  — Je suis amoureuse, fut ma seule réponse.

             Quelque deux heures plus tard,  je faisais le même aveu à Olivier et à sa femme Brigitte, ainsi qu’à mon frère Claude, venu du Canada durant le week-end. De sorte que mon « état » ne les intrigua pas.
         Cependant, le lendemain…
         — J’ai un drôle de truc, expliquai-je à Claude. Deux doigts de ma main gauche ne fonctionnent plus.
         Tout en minimisant la chose (on est comme ça, dans la famille), il proposa :
         — Je dois justement me rendre à Gaillac, tu veux que je te dépose chez le toubib, en passant ?
         J’acceptai avec empressement, ce qui l’étonna. Consulter, c’était pas mon genre. Mais bon, ce symptôme-là m’évoquait vaguement celui d’un AVC, et ça me foutait les jetons.
         Jetons partagés par mon médecin traitant qui, sitôt l’examen terminé, appela le service neurologique de l’hôpital d’Albi, en précisant :
         — J’envoie immédiatement ma patiente aux urgences !    



                                                     *


         L’I.RM. ayant  révélé ce que l’on sait, j’annonçai brutalement la nouvelle à mes proches avant d’être transférée dans le service ad hoc. Puis, une fois seule, j’appelai Castor.
         Pour m’excuser, eh oui.
         Lui demander pardon de l’avoir embarqué dans cette galère.
         Et le supplier de ne pas s’attacher à moi.
— Trop tard, répondit-il, et il sauta dans sa voiture.
         Le lendemain, à l’heure des visites, il était là.
         Nous ne nous sommes plus quittés, depuis.


2 commentaires:

  1. Chaque fois que je relis ces moments, une tendresse douce et légèrement triste m'envahit car j'entends la voix de notre chère Gudule... Merci Castor de l'avoir soutenue de ton soleil intérieur...

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    1. Chaque détail de cette épopée est gravé dans mon cœur. L'amour est toujours là, intact. Merci Benoît d'être toujours là également, depuis le début.

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