samedi 19 novembre 2016

LE BEL ÉTÉ 38





















                                         CHRONIQUE D’UNE MORT ANNONCÉE

         Il y a des mots affreux. Des mots empoisonnés qui, à l’instar de certaines substances chimiques, stagnent dans notre organisme sans jamais pouvoir être éliminés. « Soins palliatifs » est de ceux-là. 
         Lorsqu’une infirmière, sans malice aucune, les prononça devant moi pour la première fois, j’eus l’impression qu’un trou se creusait dans mon ventre. Un abîme, plutôt. Un gouffre sans fond.
         Bon, d’accord, Sylvain avait beaucoup maigri ; il n’était plus alimenté que par perfusion et ses examens révélaient une prolifération  mahousse de cellules atteintes. Mais de là à envisager l’issue fatale… C’est que sa guérison, j’y croyais dur comme fer, moi ! Cette certitude, c’était ma foi du charbonnier, mon bienheureux aveuglement, ma dernière étincelle d’insouciance — qu’une réflexion malheureuse  venait, sans vergogne, de réduire à néant.
         Ce fut un pan de ma vie qui s’effondra, ce jour-là.

                                                    

         Pour autant que je sache, nul n’a encore émis ces mots funestes à mon encontre.  Mais ce n’est pas exclu : j’ai déjà vu le film. Je connais par avance le nom de chaque acteur, la plupart des répliques et les étapes inéluctables de l’intrigue. Castor, non. Et  je tremble à l’idée qu’un quelconque figurant  l’affranchisse par mégarde. Ça fait vraiment trop mal !




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