Deux semaines plus tard, elle remettra au chanteur quinze poèmes — dont une bonne partie, en toute honnêteté, ne vaut pas tripette — qui, à quelques exceptions près (les moins bons, justement) formeront l'essentiel de son répertoire.
Or,
durant ce marathon, Rose néglige sa maison. On ne peut pas être à la
fois au four et au moulin, créer d'une main et briquer de l'autre.
Devant le désordre qui envahit peu à peu les pièces, la vaisselle sale
qui s'accumule dans l'évier, le panier à linge qui déborde, elle finit
par accepter l'aide que lui offre spontanément Mona Aoun.
— N'ayez aucun souci, le ménage, c'est mon rayon, déclare celle-ci en retroussant ses manches.
Elle
la repousse dans sa chambre, ferme d'autorité la porte — « Écrivez,
écrivez, moi, je me charge du reste » — et Rose, ronronnante, se laisse
faire. Après tout, elle n'a que dix-neuf ans. A cet âge, combien de
jeunes filles sont encore sous la tutelle de leur mère ?
Au terme de ces quinze jours à se côtoyer quotidiennement, elles se
tutoient. Mona Aoun, rebaptisée "Nana" par Grégoire, a tout nettoyé de
fond en comble, rangé les placards, viré les bibelots (ces
ramasse-poussière) et changé le mobilier de place. De sorte que quand,
sa "mission" terminée, la serviable voisine réintègre ses pénates, Rose
se sent étrangère dans sa propre maison.Qu'à cela ne tienne :
— Si tu as besoin de moi, n'hésite pas à m'appeler, je suis à ta disposition, lui a recommandé Mona Aoun en s'en allant.
Rose ne se le fait pas répéter. Désormais, pour un oui pour un non, elle la sollicitera. Durant deux semaines, elle a eu l'impression de retrouver sa Têta, comment pourrait-elle s'en passer à nouveau ?
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