vendredi 22 juillet 2016

ROSE 84

 

                                 LE CADEAU

Combien de temps dure cette scène odieuse ? Une demi-heure ? Une heure? Rose est incapable de l'évaluer. Noyée dans sa peur, elle n'a plus qu'une pensée, une seule : QUE ÇA S'ARRÊTE.
         Or, ça finit par s'arrêter. 
         Plus de cris, soudain. Plus de coups. Plus d'aboiements.
Le silence.
            Lentement, elle se relève, s'approche de la fenêtre. Écarte légèrement le rideau.
La silhouette massive est toujours là, dans l'ombre, qui l'apostrophe : 
— Inutile de te cacher, je vois bien que tu m’espionnes.  Mais ne t'inquiète pas, je te laisse : j'ai dit tout ce que j'avais à dire, il ne me reste plus qu'à agir
Et sur ces mots chargés d'on ne sait quelle menace, Mona s'éloigne en trébuchant, pesante, voûtée comme une vieille. Terriblement, effroyablement pathétique. 
Ce n'est qu'un faux départ, hélas. Vingt mètres plus loin, elle fait volte-face et revient sur ses pas.
Ah, j'oubliais mon petit cadeau d'adieu !
Elle jette quelque chose par-dessus le mur, puis s'en va pour de bon. Rose la suit des yeux jusqu'à ce qu'elle disparaisse, et lorsqu'elle est certaine de n'avoir plus rien à craindre, redescend, déverrouille la porte et se glisse dans le jardin à la recherche du "cadeau".
Julie, plus vive qu'elle, le trouve aussitôt. Et reste à côté, à geindre en le poussant du museau.
Dans la pénombre, Rose se baisse, ramasse la "chose", la relâche dans un cri.
C'est une boule de poil.
Un cadavre encore chaud.
Celui du chaton, étranglé.



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