mardi 6 septembre 2016

ROSE 128

 

       ADIEUX

— Alors, il est comment, cet appartement ? s'enquiert la tante Ida sitôt que Rose raccroche.
Un trois pièces, rue de la Goutte d'or, à Aubervilliers.
Ah ? Pas à Paris ?
— Juste à côté : dès qu'on franchit le périphérique, les loyers sont moitié moins chers pour le double de surface.
— Petit bal d'Aubervilliers… On chantait ça, dans ma jeunesse. Tu t'installes quand ?
— Le plus vite possible. Le bail démarre le 15, donc, logiquement, le 16, je serai dans mes murs. J'ai tellement attendu ce moment.
         Elle attrape Olivier qui rampait à ses pieds, le fait sauter dans ses bras.
On a une maison à nous, mon lapin !
Avec un zardin ? demande Grégoire.
Faut rien exagérer. Les jardins, tu sais, à Paris…
Ze veux un zardin, insiste Grégoire.
Comme chez Dida ?
Hochement de tête vigoureux.
Tu n'as qu'à rester ici, avec moi, dit la tante.
Grégoire fronce les sourcils en se demandant si c'est du lard ou du cochon, puis interroge sa mère du regard.
— Mais c'est qu'elle me kidnapperait mon fils, cette "brigande" ! s'esclaffe Rose.
— Que veux-tu, le mien est si loin…


*

        
         Et vient l'heure des adieux.
         — C'est Étienne qui te conduit au train ? interroge tante Ida.
Non, j'ai appelé un taxi.
  Ça va te coûter les yeux de la tête.
— Tant pis. Je préfère garder mes distances, tu comprends. Tu lui diras au revoir de ma part ?
Rose ne le reverra jamais : ses études terminées, Etienne partira pour le Liban en guerre avec "Médecins sans frontières", et y sera tué. À tort ou à raison, elle s'en sentira toujours responsable.
        



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