lundi 2 mai 2016

ROSE 5

                                               L’ACCIDENT (SUITE)
 
      Par chance, il y en a un. Un petit interne timide et maladroit, trop novice encore pour établir un diagnostic mais assez dégrossi pour recoudre une blessure.
      Ayant longuement examiné celle de Grégoire, il le fait allonger sur une table et prépare son matériel. Le petit garçon qui, fatigué de pleurer, s'était assoupi sur l'épaule de sa mère, se remet aussitôt à brailler.
      — Qu'allez-vous lui faire ? se méfie Rose, agressée par la vue des pinces, seringues et autres instruments de torture.
      — Ne vous inquiétez pas, il ne sentira rien, ment l'interne qui n'en mène pas large.
       De toute évidence, la perspective de travailler sous le regard suspicieux d'une mère l'affole. Il en perd ses moyens. Ce que voyant, Amir ordonne à sa femme :
      — Va t'asseoir dans la salle d'attente.
      — Pas question, s'insurge Rose.
      — Fais ce que je te dis. Omane, emmène-la !
      Subjuguées par son ton sans réplique, les deux femmes obéissent. Durant le petit quart d'heure que dure l'opération, elles n'échangent pas un mot. Mais Rose se ronge les ongles au sang et Omane fixe le vide, droit devant elle. Par chance, les murs sont insonorisés. Ni l'une ni l'autre n'entend les hurlements de l'enfant que l'on recoud.
      Enfin, la porte s'ouvre et Amir paraît, très pâle, portant un Grégoire encore secoué de sanglots et la jambe couverte d'un énorme pansement.
      — Mon bébé ! s'écrie Rose, en fonçant sur son fils.
      Elle le prend, le cajole. L'embrasse tout partout.
      — Mon pauvre petit trésor… Ça va ? Le docteur ne t'a pas fait trop mal ?
      — Il ne faut surtout pas qu'il plie le genou, recommande Rachad.
      Rose approuve d'un hochement de tête, puis se tourne vers son mari.
      — Amir, est-ce que… ?
      Elle s'arrête, médusée. Le visage dans les mains, Amir pleure à chaudes larmes.



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